Laisser sa trace dans lHistoire
L’histoire de Médée est une tragédie qui m’a beaucoup marquée.
Selon les croyances de l’époque, il y avait deux moyens de laisser sa trace dans l’Histoire.
Assurer sa descendance ou accomplir des actes héroïques.
C’est une thèse à laquelle j’adhère depuis longtemps.
Evidemment, avoir un enfant, lui transmettre une partie de son patrimoine génétique et un certain savoir est une manière indiscutable de participer au renouvellement des générations, à la survie de l’Humanité. C’est un témoignage de sa propre existence.
L’acte héroïque est plus complexe, me semble-t-il à définir car les possibilités sont plus vastes.
Hier, je suis allée à une conférence s’articulant autour du don d’organes et de moelle osseuse (France Adot). Tous les acteurs concernés semblaient être présents : des membres du corps médical (médecin greffeur de la cornée, médecin spécialisé dans la sensibilisation des familles sous le choc de la perte de l’être aimé face à la possibilité du don d’organes, infirmière), des personnes ayant fait don des organes d’un être cher et d’autres n’ayant pas réussi car n’étant pas prêtes à faire cette démarche à ce moment-là, des personnes greffées, d’autres en attente de greffe et un donneur de moelle osseuse !
Voici un petit condensé de ce qui m’a semblé important.
En Espagne, le taux du don d’organes semble meilleur que dans les autres pays européens car ce sont des équipes spécialisées dans le don d’organes qui approchent la famille soudainement frappée par le deuil (cf Todo sobre mi madre / Tout sur ma mere, Pedro Almodovar).
Nous devons donc, en France et ailleurs, tendre vers cet exemple-là qui fonctionne en ayant dans les hôpitaux des personnes formées pour aborder le sujet du don d’organes et ayant appris à demander. Cette requête doit être faite avec humanité et sensibilité, dans l’espérance d’un accord de prélèvement des organes mais dans un esprit de vigilance et de respect pour la famille du donneur face à leurs capacités à appréhender et à accepter le don. Parfois, un non est mieux vécu par la famille qu’un oui hésitant.
Cependant, par expérience, le corps médical s’accorde à dire que l’on vit mieux un oui qu’un non, source parfois de remords à contre-coup.
Choisir de devenir donneur ou d’accepter qu’un proche le devienne est un devoir social et humain, me semble-t-il. Au pays basque, il y a apparemment davantage de donneurs que dans les autres régions de France (je n’ai malheureusement pas de chiffres à vous donner) car la tradition veut qu’un donneur soit considéré comme un héros.
Et bien, je crois que les Basques ont raison. Grâce aux dons d’organes et de moelle osseuse, on accorde aux bénéficiaires, du bonus, c’est-à-dire du temps. Du temps qui, je pense, est bien ou mieux utilisé car j’ai la conviction que l’on vit différemment quand on a connu le sursis.
Et si la greffe ne fonctionne pas ou n’a jamais lieu, il ne faut pas oublier comme le soulignait un des médecins hier, que l’important est l’espoir offert aux malades en envisageant une greffe pour améliorer le quotidien de cette personne.
En conclusion, tout temps accordé grâce au bénéfice d’une greffe est du temps précieux et assurément bien rentabilisé.
Alors je pense qu’être donneur, c’est accomplir un acte héroïque, c’est offrir la vie à quelqu’un et donc laisser sa trace dans l’Histoire…